Association pour la découverte et la promotion du patrimoine de St Pierre

Karl Lang: un Allemand à Quiberon en 1940-1941

Extrait de l'article
Le 28 novembre 1995 la mairie de Quiberon reçoit une lettre de Karl Lang avec des photos qu'il a faites lorsqu'il était militaire à Quiberon pendant l'Occupation.
Participants à la rédaction de cet article
Guillaume Lefevre a écrit cet article à partir de cette lettre de Karl Lang et de ses photos .
Il a aussi consulté des spécialistes Antoine Lebel, Alain Floch, et Yannig Kerhousse.
Copie des images et textes
interdite sans l'autorisation de KER1856
Extrait de l'article
Le 28 novembre 1995 la mairie de Quiberon reçoit une lettre de Karl Lang avec des photos qu'il a faites lorsqu'il était militaire à Quiberon pendant l'Occupation.
Participants à la rédaction de cet article
Guillaume Lefevre a écrit cet article à partir de cette lettre de Karl Lang et de ses photos .
Il a aussi consulté des spécialistes Antoine Lebel, Alain Floch, et Yannig Kerhousse.
Copie des images et textes
interdite sans l'autorisation de KER1856

Le 28 novembre 1995, un courrier peu commun arriva à la mairie de Quiberon, accompagnant une lettre en français malhabile, son auteur, Karl LANG faisait don de quelques photos, souvenir de son passage en Bretagne au début du second conflit mondial. 

NDLR – Toutes les photographies de cet article  ont été prises par Karl LANG, sauf mention contraire.

Lettre reçue par la mairie de Quiberon page 1
page 2

Karl Lang a 21 ans lorsqu’il arrive dans la Presqu’île en septembre 1940. Le contexte de l’époque est connu : après une campagne militaire de six semaines, l’Allemagne nazie occupe la partie nord de la France et depuis le 22 juin, les troupes allemandes sont dans la Presqu’île. Il n’a pas participé à la campagne de France en 1940 et c’est sa première affectation dans l’armée (Wehrmacht) quand il arrive en France. Comme il le sous-entend dans sa lettre, c’est un jeune adulte venant de « l’intérieur de son pays » pour qui la découverte de l’océan est un choc émotionnel. Il est particulièrement impressionné par les paysages marins changeant avec la marée. Impressionné également, lors de ses gardes de nuit, où seul dans son abri, il est face à la mer et aux tempêtes de l’hiver 1940. Selon ses dires, il était « heureux, à la fin de la nuit de ne plus entendre le « mugir » du vent ….”

Karl Lang est affecté à une batterie de DCA (Flak) appartenant à la Wehrmacht. Son unité n’est pas connue précisément : à cette époque du conflit, il y avait des batteries anti-aériennes disparates non encore constituées en groupe autonome. Il a probablement fait partie de la 5ème batterie de la Flak Abteilung 46H (H pour Heer armée de terre) qui occupe la région vannetaise. Sa batterie compte huit canons anti-aériens et son état-major est positionné à Lorient (1). Elle a été initialement déployée pour protéger les aérodromes bretons, d’abord à Vannes-Meucon, ensuite à la Roche-Bernard puis affectée à la défense antiaérienne des côtes à Quiberon. Karl LANG était caserné dans la colonie de vacances de la SNCF de Quiberon réquisitionnée, alors que les officiers étaient généralement logés dans les nombreux hôtels et villas de la presqu’île (2).. Sa batterie anti-aérienne était positionnée à Quiberon, dans le fort de Saint-Julien. Il était servant d’une pièce de DCA de 20 mm, une Flak 35 ou 38. 

Fort de Saint-Julien
Fort de Saint-Julien
Flack 38 - photo de propagande allemande

Pièce d’artillerie anti-aérienne Flak 38 [datée 1939]

  • Calibre 20mm, cadence de tir de 180/220 coups/min.
  • Poids : 405 kg
  • Longueur du tube : 2,25m
  • Portée en altitude : 2,2 km 
  • Servants : 7 hommes

A noter que les servants appartiennent ici à la Luftwaffe (K. LANG appartenait à l’armée de terre (Wehrmacht). 18 000 exemplaires de Flak 30 et 38 furent construits à partir de 1934 .

Il côtoie la vie quiberonnaise et est intéressé par la pêche comme le montre la photo des bateaux de retour de pêche à Port Maria. En effet, au cours de cette période les marins continuent d’aller en mer et la pêche se vend sur les marchés, officiels et parallèles (3).

Maison Saint-Cornely

Quiberon avril 1941 – soldats allemands sur le boulevard Chanard devant la maison St Cornély.

Karl LANG à droite avec les lunettes (son grade est identifiable par le col carré sur un rond de laine foncée de sa veste, il porte un modèle de veste modifiée en 1940, col vert de gris, avec épaulettes vert foncé).

Retour de pêche à Port Maria 1941
Allemands à Port Maria

La guerre continue avec l’Angleterre, ce qui nécessite pour les Allemands le positionnement de leurs sous-marins en occupant les ports atlantiques français. La venue des premiers sous-marins allemands d’abord pour réparation, date d’août 1940 et le début de la transformation du port de Lorient pour la construction de seize abris sous-marins à l’épreuve des bombes lourdes débute en janvier 1941, suite à une décision du 25 octobre 1940. La réaction des Britanniques se traduit par les bombardements aériens nocturnes de Lorient et de sa région qui débuteront le 8 août 1940, après la Bataille d’Angleterre (bombardement de Hennebont) et culmineront le 27 septembre avec le premier bombardement d’importance de Lorient (entraînant trente morts civils français) (5). La batterie de Saint Julien prend peut-être part à ces affrontements, notamment celui du 4 février 1941 lors du mitraillage par les avions anglais des batteries côtières allemandes de Quiberon. Les raids anglais sur Lorient vont culminer en mai puis ralentir en juillet 1941.

En avril 1941, Karl Lang et sa batterie quittent la Presqu’île par le train, et se dirigent vers la Vistule en Pologne, prélude à sa participation à la guerre contre l’URSS qui débute le 22 juin 1941 par l’opération Barbarossa. 

Notre ignorance de la date de naissance de Karl LANG et la fréquence de son patronyme ne nous ont pas permis de retrouver ses traces administratives et militaires, notamment la suite de sa carrière militaire à l’Est. Seule, reste cette lettre de 1995, relatant son séjour breton qualifié de « jeux d’enfant » par opposition aux horreurs probablement vécues pendant le reste de la guerre. Cette lettre exprime la nostalgie d’un vieil homme, se souvenant du jeune homme naïf qu’il était, effrayé par la mer et la folie des hommes.

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1. KERHOUSSE : communication personnelle.   

2. A. FLOCH – L’occupation allemande dans les 261 communes du Morbihan 1940-45 ; ISBN 9782954163246 

3. J.C. FICHOU – Les pêcheurs bretons durant la Seconde Guerre mondiale Chapitre IV. Une pêche très soutenue : 1940-1942 ; p.131-271.https://books.openedition.org/pur/. 

L’auteur remercie Messieurs Antoine LEBEL (spécialiste en uniforme), Alain FLOCH, et Yannig KERHOUSSE (spécialistes 2nde guerre mondiale) pour leurs connaissances des unités allemandes dans le Morbihan et de la guerre en Bretagne, ainsi que pour leur aide dans les recherches sur Karl LANG.

Sitepatrimoine.lorient.bzh : https://patrimoine.lorient.bzh/histoire/chronologie/le-xxe-siecle/1940-1949

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